Chine-Russie, alliance contre-nature ? - China-Russia, an unnatural alliance ? [2023]
Mise à jour 2024 : Le sommet des BRICS+ réuni à Kazan - du 22 au 24 Octobre 2024 - a permis d'acter une recomposition du monde en cours. S'il est encore bien trop tôt pour prédire un succès sur le long terme, plusieurs avancées ont eu lieu : que ce soit un accord préalable sur le litige frontalier entre l'Inde et la Chine ou le système de compensation des échanges BRICS Clear, ainsi qu'à l'horizon 2025 (au mieux), un système de paiement, BRICS Pay. Hôte de cette édition, le dirigeant russe Vladimir Poutine avait tout intérêt à faire avancer les divers membres sur des thématiques impactant son pays depuis 2014, et provoquer une autonomisation financière de ce groupement de pays. Mais ce fut aussi la confirmation de l'entente russo-chinoise (comme russo-indienne par ailleurs) qui facilita les échanges et l'établissement d'un cahier des charges accepté par tous. Parmi les autres projets énoncés, l'on notera utilement la volonté à terme de créer une bourse de métaux précieux pour les membres du club BRICS.
Article initialement paru sur La Vigie en Mars 2023
Le conflit en Ukraine a cristallisé les oppositions géopolitiques. Au point que Russie et Chine soient désormais encore plus liées par leur partenariat stratégique, faisant craindre au bloc occidental une bascule des autorités chinoises vers un appui militaire actif en faveur de leur grand voisin septentrional. Certains commentateurs ont jugé bon de lénifier cette alliance, jugée contre-nature et contre-productive pour la Chine. Pourtant, celle-ci s’inscrit dans une logique historique d’apaisement et de renforcement des liens depuis plusieurs décennies. La crainte des occidentaux est réelle et profonde : la première puissance industrielle en synergie avec la première puissance énergétique, c’est un ensemble géostratégique considérable. D’où l’émoi de certains commentateurs quant à ce resserrement des relations.
En premier lieu, si l'on avait souhaité éviter que la Chine ne s'approche de trop près de la Russie, il aurait déjà fallu arrimer la Russie à l'Europe, notamment en profitant de la période dite libérale de Vladimir Poutine et de sa main tendue en février 2007 à la conférence de Munich quant à une offre de sécurité européenne commune. Sécurité qui ne s’entendait pas uniquement sur le plan militaire mais aussi énergétique. L'absence de compréhension de la spécificité russe par les européens n'est, il est vrai, pas nouvelle - il faut relire les textes du XIXème siècle tel La Russie en 1839 d’Astolphe de Custine (1790-1857) - mais ce faisant elle a empêché toute compréhension du mouvement géopolitique alors en progression depuis les années 2000. À cette incompréhension s’est greffée l’objectif stratégique du grand cousin d'Amérique qui n'a strictement aucun intérêt à ce que l'Europe se fasse de Lisbonne jusqu'à Vladivostok, suivant en cela les principes énoncés par les stratégistes anglo-saxons Halford John Mackinder (1861-1947), Alfred Mahan (1840-1914) et Nicholas Spykman (1893-1943). C'est déjà le premier écueil, celui d’avoir déconsidéré la Russie en refusant de prendre en considération ses aspirations (rejoindre la famille européenne) et ses inquiétudes (la prolifération de bases américaines sur l’espace du Pacte de Varsovie jusqu’aux anciennes républiques socialistes soviétiques). Une intelligence qu’avait pourtant eu en son temps le chancelier Otto von Bismarck (1815-1898), lequel avait bien saisi qu’il fallait arrimer la Russie au cœur de la politique de stabilité européenne tout en évitant de l’assimiler à un pays européen comme les autres.
En second lieu, les chancelleries occidentales ont une tendance à surestimer leur propre influence en ces années 2020 : à ce jour, la Chine a moins besoin du monde que le monde n'a pour l'heure besoin de la Chine en tant que première usine du monde, et plus encore depuis que cette dernière progresse très rapidement dans le domaine du secteur tertiaire. Or, le deal initial fin des années 1990-début des années 2000 était de délocaliser les industries occidentales pour produire moins cher et polluer plus loin tout en conservant les sièges sociaux, les unités de recherche et développement et les activités de services sur les territoire d’origine. Cette politique faussement ingénieuse a dévitalisé les pays européens, et dans une mesure moindre les États-Unis, tout en dopant la Chine de méthodes, de machines-outils, d’unités de production et de formations ad hoc. Or, rappelons-nous que la Chine – appelée aussi Empire du Milieu – est restée au centre de l'économie-monde pendant plusieurs siècles tout en contrôlant fermement les entrées/sorties sur son territoire, au niveau de la rivière des Perles près de Canton en un endroit appelé Thirteen Factories par les marchands anglais ou Shísān Háng par les marchands chinois. Même si l’Empire espagnol du XVIème siècle (Empresa de China) et le Royaume-Uni du XVIIIème siècle (l’East India Company et l’affaire James Flint de 1759) ont caressé un temps le projet d’une Chine sous tutelle, ou à tout le moins sous contrôle limité, les deux puissances européennes furent néanmoins obligées de renoncer à leur dessein. Objectif qui n'adviendra partiellement qu'au XIXème siècle jusqu'à la première moitié du XXème (de la première guerre de l'opium de 1839-1842 à l'avènement de la Chine communiste en 1949) avec les concessions territoriales liées aux voies ferrées suivi par le traumatisme du sac du Palais d’Été, ou Yuanmingyuan, de 1860 où disparurent des ouvrages, des objets d’art et des parures inestimables, soit détruits soit vendus. Les chinois, comme les russes par ailleurs, ont de la mémoire et les humiliations des siècles passés n'ont pas été oubliées.
Ensuite, une Russie exsangue sous contrôle occidental, ou pire, morcelée en plusieurs régions indépendantes comme le désirait le conseiller polono-américain Zbigniew Brzezinski (1928-2017), serait inacceptable pour les autorités chinoises. Bien que cette amitié soit soudée par les circonstances géopolitiques – la défiance à l’égard de la superpuissance américaine pour être plus précis – la Chine a malgré tout de bonnes relations avec la Russie, d'autant que le dernier différend territorial de l'île Damanski/Zhenbao a été réglé solennellement voici quelques années (une dispute frontalière de longue date qui faillit se régler par une guerre générale entre les deux puissances communistes en 1969). Les stratèges chinois savent qu’une reprise en main de l’île de Taïwan ne peut s’opérer sous la menace d’un voisin septentrional opposé à ses intérêts. D’où la difficulté de croire que la Chine puisse rester inerte en cas de renversement du cours du conflit avec l’Ukraine par l’apport toujours plus intrusif et croissant du matériel et personnel de l’OTAN jusqu’à menacer l’intégrité de la Fédération de Russie. Plusieurs membres de la haute administration chinoise ont souligné l’hypocrisie des européens et des américains quant à l’aide apportée à l’Ukraine concomitamment à leur crainte d’une aide chinoise apportée à la Russie.
Enfin, d’aucuns demandent à ce que la Chine tente de renouer avec les européens. Mais où y aurait-il eu rupture, qu’elle soit diplomatique, technologique ou commerciale? Au contraire, il faut bien comprendre qu'au petit jeu de l'industrialisation, les ingénieurs chinois n'ont plus grand chose à apprendre des occidentaux (cf les électromobiles qui sont de qualité égale – si ce n’est supérieure pour quelques modèles déjà – à leurs homologues européens et américains avec un coût inférieur en sus) et qu'ils ont un marché domestique phénoménal de plusieurs centaines de millions d’individus. L'exportation des produits et services chinois représente 15,1% du marché mondial, avec un point de bascule qui peut être daté de l’année 2009 où la Chine dépassa l’Allemagne comme premier exportateur mondial. Depuis, la tendance ne s’est pas inversée, bien au contraire, au point de considérer que le décrochage est devenu vraiment abyssal entre la Chine et les états européens. Il faut rappeler à escient les chiffres de 2023 : PIB Chine 22 milliards $ ; PIB Allemagne 4 milliards $ ; PIB Royaume Uni 3.5 milliards $ ; PIB France 2.8 milliards $. Et comme l'Union européenne s’est embourbée dans des sanctions contre-productives à l’encontre de l’un de ses principaux fournisseurs énergétiques, à savoir la Russie (rappelons que la base de la croissance moderne c'est une énergie facilement accessible, abondante et à bas coût), inutile de préciser que la Chine, et l'Inde dans une moindre mesure (qui grignote des parts de marché, au point de menacer la place du Royaume-Uni en tant que 6ème exportateur mondial), se goinfrent des erreurs stratégiques du Vieux Continent. Donc oui, la Chine n'a pas coupé les ponts avec les européens, au contraire, elle se délecte de leur situation de précarité énergétique, économique et militaire, pouvant ainsi plus facilement y accroître sa présence commerciale et technologique. Et le sabotage de Nord Stream reliant la Russie à l’Allemagne est une réelle bénédiction pour sa part puisque la neutralisation des gazoducs en Mer Baltique réoriente une partie des flux gazier russes vers son territoire toujours gourmand en ressources énergétiques.
Soulignons enfin que deux victoires diplomatiques sont à
mettre au crédit de la Chine.
Premièrement le plan de paix en 12 points du 24 février 2023 a surtout été
habile diplomatiquement en dépit de son apparent échec. Aux yeux du monde, la
Chine est passée pour un faiseur de paix au détriment des occidentaux ne masquant
guère leur implication dans le conflit par l’acheminement de flux financiers,
de matériel et de personnel et l’abondance de tartarinades verbales. C’est par
conséquent une victoire symbolique sur le plan international dont peut se
targuer Pékin. L’on notera avec intérêt le point 11 ayant trait à la stabilité
des chaînes industrielles et d’approvisionnement.
Deuxièmement, le rapprochement Iran-Arabie Séoudite du 10 mars 2023 a été
célébré sous l’égide de la médiation chinoise. Là encore, les États-Unis, alliés
traditionnels de la dynastie Séoud, semblaient totalement absents du processus.
Il est vrai que la décision de Riyad et Pékin de libeller depuis 2022 un
maximum de transactions bilatérales en Renminbis (ou Yuans) atteste de cette
confiance devenue ostentatoire.
Cette partie du discours de Vladimir Poutine datée de 2007 à la conférence sur la sécurité à Munich résonne lourdement à ce jour :
« Madame la Chancelière fédérale l’a déjà mentionné. Le PIB combiné mesuré en parité de pouvoir d’achat de pays comme l’Inde et la Chine est déjà supérieur à celui des États-Unis. Et un calcul similaire avec le PIB des pays BRIC – Brésil, Russie, Inde et Chine – dépasse le PIB cumulé de l’UE. Et selon les experts, cet écart ne fera que s’accroître à l’avenir... Il n’y a aucune raison de douter que le potentiel économique des nouveaux pôles de croissance économique mondiale se transformera inévitablement en influence politique et renforcera la multipolarité. ».
Pour conclure, l’on pourrait au regard des évènements récents résumer l’approche des affaires de ce monde ainsi : les chinois sont des joueurs de Go, les russes sont des joueurs d’échecs, les américains sont des joueurs de poker et les européens sont des joueurs de dés.
Update 2024 : The BRICS+ summit held in Kazan - from October 22 to 24, 2024 - made it possible to confirm a recomposition of the world in progress. While it is still far too early to predict long-term success, several advances have been made: whether it be a preliminary agreement on the border dispute between India and China or the BRICS Clear trade compensation system, as well as by 2025 (at best), a payment system, BRICS Pay. Host of this edition, Russian leader Vladimir Putin had every interest in moving the various members forward on issues impacting his country since 2014, and in bringing about financial autonomy for this group of countries. But it was also the confirmation of the Russian-Chinese understanding (as well as the Russian-Indian understanding) which facilitated exchanges and the establishment of specifications accepted by all. Among the other projects listed, it is worth noting the long-term desire to create a precious metals exchange for members of the BRICS club.
The conflict in Ukraine has crystallized geopolitical oppositions. To the point that Russia and China are now even more closely linked by their strategic partnership, making the Western bloc fear a shift by the Chinese authorities towards active military support in favor of their large northern neighbor. Some commentators have seen fit to soften this alliance, deemed unnatural and counterproductive for China. However, it is part of a historical logic of appeasement and strengthening of ties for several decades. The fear of the West is real and profound: the leading industrial power in synergy with the leading energy power, it is a considerable geostrategic group. Hence the emotion of some commentators regarding this tightening of relations. First of all, if we had wanted to prevent China from getting too close to Russia, we would have had to tie Russia to Europe, in particular by taking advantage of the so-called liberal period of Vladimir Putin and his outstretched hand in February 2007 at the Munich conference regarding a common European security offer. Security that was not only understood on the military level but also on the energy level.
The lack of understanding of Russian specificity by Europeans is, it is true, not new - we must reread 19th century texts such as La Russie en 1839 by Astolphe de Custine (1790-1857) - but in doing so it has prevented any understanding of the geopolitical movement then progressing since the 2000s. Added to this lack of understanding is the strategic objective of the big cousin of America who has absolutely no interest in Europe being built from Lisbon to Vladivostok, following in this the principles set out by the Anglo-Saxon strategists Halford John Mackinder (1861-1947), Alfred Mahan (1840-1914) and Nicholas Spykman (1893-1943). This is already the first pitfall, that of having discredited Russia by refusing to take into consideration its aspirations (joining the European family) and its concerns (the proliferation of American bases in the Warsaw Pact area up to the former Soviet socialist republics). An intelligence that was nevertheless possessed in his time by Chancellor Otto von Bismarck (1815-1898), who had understood well that it was necessary to anchor Russia at the heart of the European stability policy while avoiding assimilating it to a European country like the others.
Secondly, Western chancelleries tend to overestimate their own influence in these 2020s: to date, China needs the world less than the world needs China as the world's leading factory, and even more so since the latter is progressing very rapidly in the tertiary sector. However, the initial deal in the late 1990s and early 2000s was to relocate Western industries to produce more cheaply and pollute further away while retaining headquarters, research and development units and service activities in the original territory. This falsely ingenious policy has devitalized European countries, and to a lesser extent the United States, while boosting China with methods, machine tools, production units and ad hoc training. Now, let us remember that China – also called the Middle Kingdom – remained at the center of the world economy for several centuries while firmly controlling the entries/exits on its territory, at the level of the Pearl River near Canton in a place called Thirteen Factories by the English merchants or Shísān Háng by the Chinese merchants. Even if the Spanish Empire of the 16th century (Empresa de China) and the United Kingdom of the 18th century (the East India Company and the James Flint affair of 1759) had for a time toyed with the project of a China under trusteeship, or at least under limited control, the two European powers were nevertheless obliged to abandon their plan. An objective that would only partially come about in the 19th century until the first half of the 20th (from the first Opium War of 1839-1842 to the advent of Communist China in 1949) with the territorial concessions linked to the railways followed by the trauma of the sack of the Summer Palace, or Yuanmingyuan, in 1860 when priceless works, objects of art and ornaments disappeared, either destroyed or sold. The Chinese, like the Russians, have memories and the humiliations of past centuries have not been forgotten.
Then, a Russia drained of blood under Western control, or worse, fragmented into several independent regions as desired by the Polish-American advisor Zbigniew Brzezinski (1928-2017), would be unacceptable to the Chinese authorities. Although this friendship is welded by geopolitical circumstances – distrust of the American superpower to be more precise – China nevertheless has good relations with Russia, especially since the last territorial dispute over Damanski/Zhenbao Island was solemnly settled a few years ago (a long-standing border dispute that almost ended in a general war between the two communist powers in 1969). Chinese strategists know that a recapture of the island of Taiwan cannot be achieved under the threat of a northern neighbor opposed to its interests. Hence the difficulty in believing that China could remain inert in the event of a reversal of the course of the conflict with Ukraine by the ever more intrusive and increasing contribution of NATO equipment and personnel to the point of threatening the integrity of the Russian Federation. Several members of the Chinese senior administration have highlighted the hypocrisy of Europeans and Americans regarding the aid provided to Ukraine at the same time as their fear of Chinese aid provided to Russia.
Finally, some are asking that China try to renew ties with the Europeans. But where could there have been a break, whether diplomatic, technological or commercial? On the contrary, it must be understood that in the little game of industrialization, Chinese engineers no longer have much to learn from Westerners (cf. electric vehicles which are of equal quality - if not superior for some models already - to their European and American counterparts with a lower cost in addition) and that they have a phenomenal domestic market of several hundred million individuals. The export of Chinese products and services represents 15.1% of the world market, with a tipping point that can be dated to 2009 when China overtook Germany as the world's leading exporter. Since then, the trend has not reversed, quite the contrary, to the point of considering that the gap has become truly abysmal between China and European states. It is important to recall the figures for 2023: China's GDP $22 billion; Germany's GDP $4 billion; United Kingdom's GDP $3.5 billion; France's GDP $2.8 billion. And since the European Union has become bogged down in counterproductive sanctions against one of its main energy suppliers, namely Russia (let us remember that the basis of modern growth is easily accessible, abundant and low-cost energy), it goes without saying that China, and India to a lesser extent (which is nibbling away at market share, to the point of threatening the United Kingdom's place as the world's 6th largest exporter), are gorging themselves on the strategic errors of the Old Continent.
So yes, China has not cut ties with the Europeans; on the contrary, it is enjoying their situation of energy, economic and military precarity, thus being able to more easily increase its commercial and technological presence there. And the sabotage of Nord Stream linking Russia to Germany is a real blessing for its part since the neutralization of the gas pipelines in the Baltic Sea is redirecting part of the Russian gas flows towards its territory, which is still greedy for energy resources.
Finally, let us emphasize that two diplomatic victories are to China's credit.
First, the 12-point peace plan of February 24, 2023 was above all diplomatically skillful despite its apparent failure. In the eyes of the world, China was seen as a peacemaker to the detriment of the West, who did little to hide their involvement in the conflict through the flow of financial, material and personnel and the abundance of verbal tartarinades. It is therefore a symbolic victory on the international level that Beijing can boast of. It is worth noting with interest point 11 relating to the stability of industrial and supply chains.
Second, the Iran-Saudi Arabia rapprochement of March 10, 2023 was celebrated under the aegis of Chinese mediation. Here again, the United States, traditional allies of the Saud dynasty, seemed totally absent from the process. It is true that the decision by Riyadh and Beijing to denominate a maximum of bilateral transactions in Renminbi (or Yuan) since 2022 attests to this now ostentatious trust.
This part of Vladimir Putin's speech from 2007 at the Munich Security Conference resonates heavily to this day:
"Madam Chancellor has already mentioned it. The combined GDP measured in purchasing power parity of countries like India and China is already higher than that of the United States. And a similar calculation with the GDP of the BRIC countries - Brazil, Russia, India and China - exceeds the combined GDP of the EU. And according to experts, this gap will only increase in the future... There is no reason to doubt that the economic potential of the new poles of global economic growth will inevitably turn into political influence and strengthen multipolarity." In conclusion, in light of recent events, one could sum up the approach to world affairs as follows: the Chinese are Go players, the Russians are chess players, the Americans are poker players and the Europeans are dice players.