La Cybergéonomie, nouvelle discipline / ​Cybergeonomy, a new discipline

 

L’émergence de la Cybergéonomie comme discipline nouvelle répond à un besoin urgent de notre époque : comprendre et maîtriser les dynamiques complexes qui lient l’écosystème numérique, les flux énergétiques et les ressources stratégiques. À l’ère où le numérique redéfinit les rapports de force mondiaux, les matières premières critiques – telles que le lithium, le cobalt, les terres rares ou encore le cuivre – deviennent les piliers d’une révolution technologique qui façonne nos sociétés. Ces ressources, indispensables à la fabrication des batteries, semi-conducteurs et autres composants essentiels, ne sont plus de simples « commodités » : elles sont les leviers d’une nouvelle souveraineté énergétique et numérique.
 
Définitions :

La génonomie se concentre sur l’interaction entre les ressources géologiques (fossiles et minérales) et les activités humaines, notamment celles à forte consommation énergétique comme l’industrie, les transports ou le numérique. 
Le terme provient initialement du naturaliste roumain Grigore Antipa (1867-1944) puis du géologue austro-hongrois Gyula Szádeczky-Kardoss (1860-1935).
La géonomie analyse comment l’exploitation de ces ressources soutient le développement économique et technologique, tout en posant des défis environnementaux et sociaux : épuisement des réserves, pollution, inégalités d’accès. 

Dans un monde où la demande énergétique croît, notamment pour alimenter les infrastructures numériques (centres de données, réseaux 5G, intelligence artificielle), la génonomie met en lumière la dépendance des sociétés modernes aux ressources non renouvelables. Par exemple, la production de batteries pour véhicules électriques ou de semi-conducteurs repose sur des métaux comme le lithium, le cobalt ou le silicium, dont l’extraction a des impacts écologiques et géopolitiques majeurs. La génonomie interroge ainsi la soutenabilité de ces modèles et cherche des voies pour optimiser l’usage des ressources tout en réduisant les externalités négatives.


La cybernétique, initiée par Norbert Wiener (1894-1964) dans les années 1940, étudie les mécanismes de communication et de contrôle dans les systèmes, qu’ils soient biologiques, mécaniques ou sociaux. Elle s’intéresse aux boucles de rétroaction (feedback loops) qui permettent à un système de s’auto-réguler ou de s’adapter. Dans le contexte moderne, la cybernétique trouve des applications dans l’intelligence artificielle, l’automatisation, les réseaux de communication et les interfaces homme-machine.
 
La cybernétique est au cœur de la révolution numérique, car elle permet de gérer des flux d’information complexes entre humains et machines. Par exemple, les algorithmes d’apprentissage automatique s’appuient sur des principes cybernétiques pour ajuster leurs comportements en fonction des données reçues. De même, les systèmes de gestion intelligente des réseaux électriques intelligents (smart grids) utilisent des boucles de rétroaction pour optimiser la distribution d’électricité en temps réel. Le tout dans un cadre d'action spécifique : le cyberespace.
  
Or, le cyberespace est aujourd’hui reconnu comme le cinquième espace stratégique, s’ajoutant à la terre, la mer, l’air et l’espace. Ce domaine, principalement constitué des réseaux numériques, des infrastructures informatiques et des flux de données, se distingue par sa transversalité : il interconnecte et influence les quatre autres milieux. Dans l’industrie civile, il sous-tend les communications, les transactions économiques et les systèmes critiques comme les réseaux électriques ou les transports. Dans le domaine militaire, il est devenu un théâtre d’opérations à part entière, où se déploient cyberattaques, espionnage numérique et guerre informationnelle, impactant directement et indirectement les capacités opérationnelles sur les autres terrains.

Cette capacité stratégique du cyberespace repose sur une dépendance forte aux matières premières stratégiques, voire critiques, telles que le silicium, le lithium, le cobalt ou les terres rares, essentiels à la fabrication des semi-conducteurs, des batteries et d'autres composants électroniques. Ces ressources, souvent concentrées dans quelques régions du globe, sont indispensables pour maintenir et développer les infrastructures numériques, rendant leur approvisionnement un enjeu géopolitique majeur. S'y ajoute la problématique de plus en plus lancinante de l'énergie et de son stockage pour alimenter à la fois les centres de données et les unités de calculs. Ainsi, la maîtrise du cyberespace, par son rôle transversal et ses besoins matériels et énergétiques, est cruciale pour la sécurité et la compétitivité des nations dans les sphères civile et militaire.  
 
Cybernétique + Géonomie :
 
Les deux disciplines se rencontrent dans leur contribution à la gestion des systèmes complexes, notamment dans le cadre de la transition énergétique et numérique. Voici quelques points d’intersection clefs :
 
  • Gestion optimisée des ressources : la cybernétique offre des outils pour améliorer l’efficacité de l’exploitation et de l’utilisation des ressources géologiques. Par exemple, les systèmes cybernétiques permettent de modéliser et de contrôler les chaînes d’approvisionnement en minerais ou en énergie, réduisant les gaspillages. Les réseaux électriques intelligents (smart grids), mentionnés plus haut, illustrent comment la cybernétique peut répondre aux préoccupations génonomiques en équilibrant la demande énergétique avec les ressources disponibles.
  • Numérisation et dépendance énergétique : la révolution numérique, portée par la cybernétique, repose sur une infrastructure matérielle gourmande en ressources géologiques. Les centres de données avec leurs serveurs (data centers), par exemple, consomment d’énormes quantités d’électricité et nécessitent des métaux rares pour leurs composants. La génonomie met en garde contre les limites de cette dépendance, tandis que la cybernétique propose des solutions pour optimiser la consommation énergétique, comme des algorithmes d’efficacité énergétique ou des architectures de calcul plus sobres.
  • Rétroaction et soutenabilité : les principes cybernétiques de rétroaction sont essentiels pour intégrer les préoccupations génonomiques dans les systèmes technologiques. Par exemple, des capteurs IoT (Internet des objets) peuvent collecter des données en temps réel sur l’état des ressources (niveaux de minerais, qualité et quantité d'iceux) et alimenter des modèles prédictifs pour une exploitation plus durable. Ces boucles de rétroaction permettent d’adapter les activités humaines aux contraintes géologiques.
  • Interface homme-machine et gouvernance : la cybernétique, en facilitant la communication entre humains et machines, peut également soutenir une gouvernance génonomique. Des plateformes basées sur l’intelligence artificielle peuvent aider à simuler les impacts de l’exploitation des ressources, à sensibiliser les décideurs et à coordonner des politiques globales pour une gestion durable.
La Cybergéonomie propose une approche intégrée pour analyser ces enjeux. Elle dépasse les silos traditionnels en combinant l’étude des flux numériques (données transitant par les infrastructures d'infonuagique ou d'infonébullisation, les satellites, les câbles terrestres et sous-marins, les tours de télécommunication etc.) avec celle des chaînes d’approvisionnement physiques, souvent concentrées dans des régions géopolitiquement sensibles. Par exemple, la dépendance envers des pays comme la Chine pour les terres rares ou la République démocratique du Congo pour le cobalt expose les nations à des vulnérabilités stratégiques majeures. Dans ce contexte, la Cybergéonomie offre un cadre pour anticiper les tensions, diversifier les sources d’approvisionnement et sécuriser les technologies critiques face aux rivalités internationales.
 
En outre, cette discipline met en lumière l’interconnexion entre les couches virtuelles (logicielle et informationnelle) et la matérielle. Les cyberattaques visant les infrastructures minières ou logistiques, par exemple, peuvent paralyser l’accès aux matières premières, tandis que le contrôle des données massives (Big Data) permet d’optimiser leur extraction et leur distribution. Ainsi, la Cybergéonomie ne se limite pas à une vision économique : elle intègre la Cybersécurité comme facteur clé de résilience face aux disruptions.
 
Un exemple factuel : les matières premières stratégiques jouent un rôle clé dans la construction d’un drone électrique (mobilité 3.0, car électrique, autonome et connectée), puisqu'elles garantissent la performance, la durabilité et l’efficacité de l’appareil. Des matériaux comme le lithium, essentiel pour les batteries haute capacité, ou les terres rares, utilisées dans les moteurs électriques et les capteurs, sont indispensables pour assurer une autonomie prolongée et une précision optimale. Leur disponibilité et leur qualité influencent directement les coûts de production et la compétitivité technologique. Dans un contexte de transition énergétique, sécuriser l’accès à ces ressources devient une priorité pour soutenir l’innovation et répondre à la demande croissante en drones électriques.
 
Promouvoir cette discipline, c’est doter les décideurs politiques, les entreprises et les chercheurs d’outils pour naviguer dans un monde où la puissance se mesure autant en téraoctets qu’en tonnes de minerais. C’est aussi encourager une gestion durable et éthique de ces ressources, afin que la transition numérique ne se fasse pas au détriment des équilibres environnementaux ou sociaux. En somme, la Cybergéonomie n’est pas seulement une réponse aux défis d’aujourd’hui : elle est une vision proactive pour bâtir un avenir où technologie et économie s’harmonisent au service du progrès global et d'une gestion rationnelle des ressources en matières premières, notoirement critiques.
 
Les puissances contemporaines les plus en vue seront celles qui pourront combiner la maîtrise algorithmique, la maîtrise métallurgique et la maîtrise énergétique.
 

 

The emergence of Cybergeonomy as a new discipline responds to an urgent need of our time: understanding and mastering the complex dynamics that link the digital ecosystem, energy flows and strategic resources. In an era where digital technology is redefining global power relations, critical raw materials—such as lithium, cobalt, rare earths, and copper—are becoming the pillars of a technological revolution that is shaping our societies. These resources, essential for the manufacture of batteries, semiconductors, and other essential components, are no longer mere " commodities " : they are the levers of a new energy and digital sovereignty.
 
Definitions : 

Genonomy focuses on the relationship between geological resources (fossil and mineral resources) and human activities, especially those with high energy demands, such as industry, transportation, or digital infrastructure.
The term originally comes from the Romanian naturalist Grigore Antipa (1867-1944) and then from the Austro-Hungarian geologist Gyula Szádeczky-Kardoss (1860-1935).
Geonomics analyzes how resource exploitation fuels economic and technological progress while posing environmental and social challenges: resource depletion, pollution, and unequal access.

In a world with escalating energy demands—driven notably by digital infrastructure like data centers, 5G networks, and artificial intelligence—genonomics highlights humanity’s reliance on finite geological resources. For instance, producing batteries for electric vehicles or semiconductors requires metals like lithium, cobalt, or silicon, with significant ecological and geopolitical consequences. Genonomics thus questions the sustainability of these models and seeks pathways to optimize resource use while mitigating negative externalities.


Initiated by Norbert Wiener (1894-1964) in the 1940s, cybernetics studies communication and control mechanisms in systems, whether biological, mechanical, or social. It focuses on feedback loops that enable systems to self-regulate or adapt. In the modern era, cybernetics underpins applications in artificial intelligence, automation, communication networks, and human-machine interfaces.
 
Cybernetics is central to the digital revolution, managing complex information flows between humans and machines. For example, machine learning algorithms rely on cybernetic principles to adjust behaviors based on incoming data. Similarly, smart grids use feedback loops to optimize electricity distribution in real time, balancing supply and demand efficiently. All within a specific framework of action : cyberspace.

Especially nowadays, Cyberspace is acknowledged as the fifth strategic domain, alongside land, sea, air, and space. This domain, primarily composed of digital networks, IT infrastructure, and data flows, is distinguished by its transversality: it interconnects and influences the other four domains. In the civilian industry, it underpins communications, economic transactions, and critical systems such as power grids and transportation. In the military sphere, it has emerged as a distinct theater of operations, where cyberattacks, digital espionage, and information warfare are conducted, directly and indirectly affecting operational capabilities across other domains.

This strategic capacity of cyberspace hinges on a significant dependence on strategic, and often critical, raw materials such as silicon, lithium, cobalt, and rare earths, which are essential for manufacturing semiconductors, batteries, and other electronic components. These resources, frequently concentrated in a few regions of the world, are vital for maintaining and developing digital infrastructure, making their supply a major geopolitical issue. Added to this is the increasingly nagging problem of energy and its storage to power both data centers and computing units. Consequently, mastery of cyberspace, through its transversal role and material requirements, is critical to the security and competitiveness of nations in both civilian and military spheres.
 
Cybernetics + Geonomy :  
 
The two disciplines converge in their contributions to managing complex systems, particularly in the context of energy and digital transitions. Key points of intersection include :
 
  • Optimized Resource Management : Cybernetics provides tools to enhance the efficiency of geological resource extraction and utilization. For instance, cybernetic systems can model and control supply chains for minerals or energy, minimizing waste. Smart grids exemplify how cybernetics addresses genonomic concerns by aligning energy demand with available resources.
  • Digitalization and Energy Dependence : The cybernetics-driven digital revolution relies on energy-intensive infrastructure that consumes geological resources. Data centers, for example, require vast amounts of electricity and rare metals for their components. Genonomics warns of the limits of this dependency, while cybernetics offers solutions to optimize energy consumption, such as energy-efficient algorithms or leaner computing architectures.
  • Feedback and Sustainability : Cybernetic feedback principles are vital for integrating genonomic concerns into technological systems. IoT sensors, for instance, can collect real-time data on resource states (e.g., mineral reserves, quantity and quality of these) and feed predictive models for more sustainable exploitation. These feedback loops enable human activities to adapt to geological constraints.
  • Human-Machine Interfaces and Governance : By facilitating communication between humans and machines, cybernetics can support genonomic governance. AI-based platforms can simulate the impacts of resource exploitation, raise awareness among policymakers, and coordinate global strategies for sustainable management.
Cybergeonomy offers an integrated approach to analyzing these issues. It transcends traditional silos by combining the study of digital flows (data transiting through cloud computing or edge computing infrastructures, satellites, terrestrial and submarine cables, telecommunications towers, etc.) with that of physical supply chains, often concentrated in geopolitically sensitive regions. For instance, dependence on countries like China for rare earths or the Democratic Republic of Congo for cobalt exposes nations to major strategic vulnerabilities. In this context, cybergeonomy provides a framework for anticipating tensions, diversifying supply sources, and securing critical technologies in the face of international rivalries.

Furthermore, this discipline highlights the interconnection between the virtual (logical - informational) and the material layers. Cyberattacks targeting mining or logistics infrastructure, for example, can paralyze access to raw materials, while controlling big data makes it possible to optimize their extraction and distribution. Thus, ​​Cybergeonomy is not limited to an economic vision: it integrates Cybersecurity as a key factor in resilience in the face of disruptions.

A factual example : strategic raw materials play a key role in the construction of an electric drone (mobility 3.0, because it is electric, autonomous, and connected), as they guarantee the performance, durability, and efficiency of the device. Materials such as lithium, essential for high-capacity batteries, or rare earths, used in electric motors and sensors, are essential to ensure extended autonomy and optimal precision. Their availability and quality directly influence production costs and technological competitiveness. In a context of energy transition, securing access to these resources is becoming a priority to support innovation and meet the growing demand for electric drones.

Promoting this discipline means providing policymakers, businesses, and researchers with the tools to navigate a world where power is measured as much in terabytes as in tons of minerals. It also encourages sustainable and ethical management of these resources, so that the digital transition does not come at the expense of environmental or social balances. In short, Cybergeonomy is not only a response to today's challenges: it is a proactive vision for building a future where technology and economy harmonize to serve global progress and rational management of raw material resources, which are notoriously critical.
 
The most prominent contemporary powers will be those that can combine algorithmic mastery, metallurgical mastery and energy mastery.